Le monde du travail | Antiquité, Moyen Âge, Actuel
Table des matières
Les origines de la philosophie expérimentale
Des communautés de métiers et du libéralisme
La parenthèse Albert Camus
Monde : La naissance de la créativité
La construction des pyramides
Quelques personnalités
Arts, artisans et artistes
Libéralisme (économique), industrialisation et conditions du travail
Restif de la Bretonne, écrivain
L'art du vitrail
Vidéos
Les “petits métiers” où les métiers de rue au XVIIIe siècle
La petite histoire internationale du café et de l'établissements dit “café”
Les origines de la «philosophie expérimentale»
INTRODUCTION
Parmi les nombreuses avancées techniques – pour la plupart d"origine chinoise – se trouvaient «de meilleurs harnachements pour les chevaux de selle et de trait, le moulin à eau, le moulin à vent, la scie mécanique, les fenêtres vitrées, les lunettes, la charrue à roues, le gouvernail, les portes d'écluse, l'horloge de plancher et, enfin, l'imprimerie ». Ces techniques nouvelles étaient le stimulus indispensables à la philosophie mécaniste » qui caractérisait la Révolution scientifique.
L'historiographe H. F. Cohen a tourné en dérision ce qu'il qualifie de «représentation naïve de la Révolution scientifique» :
Si le propos est volontairement caricatural, il n'est pas faux de dire qu'avant la Renaissance la tendance dominante chez les savants européens était de considérer que la meilleure manière d'arriver à connaître la nature était de compulser les écrits d'Aristote. Il est également raisonnable d'affirmer qu'à l'époque de Galilée, une nouvelle façon d'appréhender la connaissance – par voie d'expérimentation – gagna la faveur de certains cercles intellectuels de l'élite. Mais si Galilée fit une intense propagande en faveur de cette recomposition, ce n'est certainement pas lui qui l'initia.
Selon une anecdote bien connue, relevant de la «représentation naïve» susmentionnée, Galilée aurait lâché deux objets de poids différents du haut de la tour de Pise. L'histoire raconte que les opposants scolastiques de Galilée soutenaient qu'un objet lourd devait tomber plus vite qu'un objet léger – puisque Aristote l'avait affirmé. Galilée aurait donc proposé de lâcher simultanément deux boules de poids différents du haut d'une tour pour voir si la plus lourde des deux toucherait effectivement le sol la première. Les professeurs de philosophie rejetèrent sa proposition, la considérant comme une pure perte de temps. Mais Galilée entreprit son expérience malgré tout et prouva bien évidemment qu'Aristote se trompait. Les deux boules touchèrent le sol en même temps, ce qui signifiait qu'elles étaient tombées à la même vitesse.
Cette anecdote apocryphe, «sans doute entièrement factice» est l'un des mythes fondateur des sciences modernes. Si elle illustre bien l'essor de l'expérimentalisme au XVIIe siècle, elle entretient l'idée erronée qu'il serait le produit de l'invention d' «une série de penseurs européens». Parmi les autres personnalités à qui l'on attribue régulièrement d'avoir introduit la pratique empirique dans les sciences, on compte Francis Becon (qui prit parti pour la logique inductive contre la logique déductive aristotélicienne) et William Gilbert (qui puplia en 1600 le premier ouvrage savant de physique expérimentale, De magnet – «De
l'aimant » – un compte rendu détaillé, en latin, de ses expériences avec des aimants).
Si la plupart du temps le récit de la Révolution scientifique ressasse une version ou une autre de l'histoire des «grands penseurs», certains récits dénotent parfois. Il y a de cela plus d'un demi siècle, l'historien Edgar Zilsel présenta une autre interprétation : «La méthode expérimentale ne descend pas, et ne pouvait pas descendre, des conceptions métaphysiques des philosophes de la nature. Il nous faut chercher ailleurs, à un autre échelon social, pour lui trouver des antécédents directes.» La démarche expérimentale, expliquait Zilsel, connut un long développement avant que quelques savants n'y prêtent attention et ne s'en servent à leurs propres fins. Les écrits de Galilée, Bacon et Gilbert eux-mêmes indiquent tous très clairement que l'inspiration leur venait des mineurs, des marins, des forgerons, des fondeurs, des mécaniciens, des souffleurs de verre, des horlogers et des constructeurs navales : c'est-à-dire des travailleurs manuels de leur époque.
Les plus éminents praticiens de chaque métier avaient affiné leur savoir-faire au fil d'une longue expérience. Bien souvent, ils avaient établis des règles chiffées, à l'aide de mesures répétées, qui guidaient leurs activités. «Les mesures réglées des artisans à l'aube du capitalisme, bien qu'elles ne soient jamais nommées ainsi, précédèrent les lois de la physique moderne», écrivait Zilsel. Le principal accomplissement de William Gilbert ne fut pas d'inventer la démarche expérimentale mais d'être «le premier savant de formation universitaire à oser adopter la méthode expérimentale des artisans qualifiés et d'en communiquer les résultats dans un livre [...] destiné à un lectorat cultivé ».[...]
Savants contre artisans ?
La critique de Zilsel, comme on peut s'en douter, suscita une vive opposition : «une grande partie des scientifiques et des historiens des sciences frémissaient d'horreur, tels des vierges effarouchées, à l'idée que la société, par le biais de techniques, puissent informer les sciences.» [...]
[...] Il est important de garder à l'esprit que les premiers savants modernes qui cherchaient à puiser dans les savoirs des artisans ne représentaient qu'une petite fraction de l'élite intellectuelle. La grande majorité d'entre eux résistait farouchement à la «réforme du savoir» promue par Francis Bacon et d'autres, frustrés par le conservatisme universitaire. [...]
[...] En résumé, la méthode expérimentale qui caractérise les sciences modernes ne trouve pas son origine dans les réflexions d'une poignée de savants de l'élite universitaire, mais dans les pratiques quotidiennes de milliers d'artisans anonyme qui, tâtonnant avec leurs outils et matériaux, perfectionnaient leur art. La «philosophie expérimentale», déclarait en 1668 le philosophe baconnien Joseph Glanvill, est fondée sur «ces choses qui ont été découvertes par des artisans illettrés ».[...]
Rechercher la sagesse dans les rues et les ateliers
Colette et les peintres en bâtiment
(Probablement des travaux dans son institut de beauté)
Paris, 1932 ; l'écrivaine Colette n'hésite pas à monter à l'échelle pour donner ses instructions.
Bacon est traditionnellement présenté comme le premier à avoir reconnu que la vraie connaissance et par conséquent la «véritable maîtrise» de la nature se trouvait dans les ateliers des artisans. En réalité, il ne fut que l'un des premiers philosophes modernes, parmi d'autres, à commencer à voir les choses ainsi. Aux alentours de 1450, un livre du philosophe allemand Nicolas de Cues rejetait l'enseignement oratoire et soutenait qu'au contraire «la sagesse peut se trouver dans les rues et sur les places de marché, ou se font ordinairement le pesage et la mesure». En 1553, Jean Louis Vives (Juan Luis Vives) expliquait à ses confrères universitaires qu'ils ne devraient pas «avoir honte d'entrer dans les échoppes et les ateliers, de poser des questions aux artisans et de se renseigner sur leur travail ». [...]
[...] Roger Bacon a souvent été présenté comme ayant précédé Francis Bacon trois siècles plus tôt en reconnaissant la valeur scientifique des pratiques artisanales. En effet, dans son Opus Majus, il déclarait :
Les arcanes du savoir furent toujours d'avantage pénétrés par des hommes simples et méconnus que par les hommes de grande renommée. J'ai appris plus de choses utiles et excellentes au contact des gens fort simples sans la moindre renommée dans les lettres, qu'après de tous mes illustres professeurs.[...]
Galilée et les artisans
Galilée n'avait pas eu besoin des écrits de Bacon pour comprendre que la fréquentation des artisans pourrait lui être grandement bénéfique. Dans son œuvre la plus marquante, le Discours concernant deux sciences nouvelles, il précisait au sujet de la fabrique d'armes de Venise :
Quel large champ de réflexion me paraît ouvrir aux esprits spéculatifs la fréquentation assidue de votre fameux arsenal, [...] particulièrement le quartier des «travaux mécaniques». Toutes sortes d'instruments et de machines y sont en effet constamment mis en œuvre par un grand nombre d'artisans dont certains, tant par les observations que leurs prédécesseur leur ont léguées que par celles qu'ils font sans cesse eux-mêmes, allient nécessairement la plus grande habilité au jugement le plus pénétrant.
Son interlocuteur répondait alors :
Rien n'est plus vrai ; curieux de nature, je vais souvent, moi aussi, pour mon plaisir, visiter ces lieux et me mêler à ceux que pour leur supériorité sur les autres ouvriers nous appelons des «maîtres» (proti) ; leur conversation m'a plus qu'une fois aidé à chercher l'explication de certains faits non seulement étonnant, mais encore mystérieux et quasi inimaginable.[...]
Le travailleur manuel
On pense généralement aux peintres, sculpteurs et architectes de la Renaissance comme à des représentants de la «grande culture» plutôt qu'à des travailleurs manuels pratiquant un métier pour gagner leur vie. Leurs activités sont généralement considérées comme relevant du domaine de l'histoire de l'art plus que de celle des sciences. Ces idées sont à revoir. Pour commencer, il faut savoir que les artistes étaient issus des rangs des travailleurs manuels : «Au cours du XVe siècle, les peintres, les sculpteurs et les architectes italiens s'étaient lentement séparés des peintres chauleurs, des tailleurs de pierres et des maçons. Comme la division du travail était encore peu poussée, les mêmes artistes travaillaient souvent dans plusieurs domaines artistiques, et souvent dans l'ingénierie. »
Les architectes de cette époque, qui firent considérablement avancer la science de la mécanique, ne jouissaient généralement pas d'un statut social plus élevé que celui d'un artisan qualifié : [...] les grands architectes du Moyen Âge avaient été quasiment tous anonyme. [...] Cet anonymat était dû en partie au préjugés des auteurs antiques et médiévaux à l'encontre du travail manuel. Ils assignaient à l'architecture une place subalterne dans les réalisations humaines, et la considéraient comme une profession ne convenant pas à un homme éduqué.[...]
[...]Léonard de Vinci est aujourd'hui salué comme l'exemple même du génie universel maîtrisant toutes sortes de savoirs-faire et s'illustrant par des réalisations dans les beaux-arts et les sciences à un niveau inégalé avant ou après lui. Assez ironiquement, pourtant, à son époque il ne jouissait pas du plein prestige de l'homme instruit, car il n'avait pas reçu d'éducation classique et n'écrivait pas en latin.[...] Léonard vitupérait «certains présomptueux qui le disaient ignorant (il me méprisent, moi l'inventeur, [...] du fait que je ne suis pas un lettré»), sur le compte desquels il écrivait : Si comme eux, je n'allègue pas les auteurs, c'est chose bien plus grande et plus rare d'alléger l'expérience, maîtresse de leurs maîtres. Ils vont, gonflés et pompeux, vêtus et parés non de leurs travaux mais de ceux d'autrui.[...]
Médecins, chirurgien, apothicaires et «charlatans»
[...]«Au Moyen Âge, expliquait Roy Porter, l'organisation professionnelle des praticiens médicaux formait une pyramide avec les médecins en haut, les chirurgiens et apothicaires au-dessous – les autres guérisseurs étant écartés ou décriés comme "charlatans" »
En tant qu"art pratique, la chirurgie était déjà mésestimée par les médecins au temps de Galilée. En 1163, à une époque où l'élite médicale était composée d'ecclésiastiques et où la parole de l'église faisait fois, la séparation des deux arts fut consacrée au concile de Tours par la proclamation Ecclésia abhorret a sanguine («l'Église abhorre le sang»). Ce cloisonnement de la chirurgie et de la pratique médicale – si préjudiciable à ces deux disciplines » – allait perdurer sept siècles.
Paracelse ne fut pas le seul, au XVIe, à critiquer l'imposition de cette division sociale du travail médical. Son célèbre contemporain Vésale déplorait également que «le système thérapeutique fut misérablement écartelé », et reprochait aux «médecins se parant du grand nom de physicien» de reléguer les actes médicaux «à ceux qu'ils appelle chirurgiens et qui leur tiennent lieu de domestiques». «Les médecins les plus réputés, accusait-il encore, pleins de répugnance pour le travail manuel», préféraient «déléguer à leurs serviteurs les interventions chirurgicales qu'ils jugeaient nécessaires d'opérer sur les malades ; ils se contentaient d'y assister, comme des architectes supervisant des travaux.»
En dépit de ces protestations, la médecine et la chirurgie allaient rester séparées jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, à l'aube du «siècle des révolutions». L'une des grandes contributions de la Révolution française fut d'abolir la séparation entre médecins et chirurgiens, et par conséquent de créer une profession médicale unifiée.» De son côté, la Révolution américaine eut un effet similaire : «La pernicieuse séparation entre médecine et chirurgie ne s'enracina jamais [aux États-Unis]. [...] C'est sans aucun doute l'une des raisons de l'excellence précoce de la chirurgie américaine.»[...]
Le contexte social ionien
Période (Antiquité grec)
Grèce archaïque (VIIIe - 480) av. avant notre ère)
Grèce classique (480- 323 av. notre ère)
Marchand de glaces, Argentine, 1950
L'environnement social des Grecs d'Ionie était radicalement différent de celui de leur prédécesseurs Égyptiens et Babyloniens. Ces civilisations plus anciennes, fondées sur l'agriculture, se caractérisaient par des formes d'organisation sociale totalitaires dans lesquelles le savoir, notamment scientifique, se trouvait monopolisé par des castes sacerdotales conservatrices, elles-mêmes subordonnées à un monarque absolu. Un tel climat social favorise le traditionalisme et décourage toute pensée originale et créative.
Des formes d'organisation sociale très différentes s'étaient mises en place dans le monde grec, et en particulier sur la côte ionienne, vers le VIIIe siècle avant l'ère chrétienne. L'économie n'y reposait pas uniquement sur l'agriculture : une activité marchande non négligeable s'était développé, suivant l'exemple phénicien. Le rôle grandissant du commerce avait entraîné la croissance de classes sociales non agraire : marchands, ouvriers, artisans, constructeurs navals, marins. Ces classes, même dans les villes, ne représentaient qu'une «petite fraction» de la population, mais leur existence même introduisait une qualité nouvelle dans la communauté et sa structure». Selon Plutarque, «travailler n'avait rien de honteux» dans le monde grec du début du VIe siècle avant l'ère chrétienne, «et l'exercice d'un métier n'entraînait aucune discrimination».
Les nouvelles colonies grecques qui fleurissaient sur la côte ionienne étaient des centres commerçants. Elles exportaient de l'huile, du vin, des armes, des poteries, des bijoux et des vêtements, et importaient des céréales, du poisson, du bois, des métaux et des esclaves. On trouvait dans ces cités portuaires des immigrés vénus de tout le monde grec, et même d'au-delà, ainsi que des natifs d'Asie Mineurs. Des gens d'origines diverses, loin de leur cadre de vie traditionnel, se trouvaient exposés à une multiplicité d'idées et de coutumes «étrangères». L'existence de cette population multilingue et pluriethnique, au sein d'une économie commerçante et durant une période de forte expansion économique, engendra une situation favorable à l'émulation intellectuelle.
[...] Il ne faut pas imaginer Thales, Anaximandre, Anaximène et Héraclite comme des génies isolés, mais comme des représentants les plus en vue d'un vaste et dynamique mouvement de «science populaire» engendré par des luttes de classes du monde antique.
Les illustres philosophes-scientifique ioniens étaient eux-mêmes soit marchand, soit fortement influencés par ces derniers. En d'autre termes, il ne s'agissait pas de penseurs isolés dans leur tour d'ivoire mais de citoyens éminent et actifs. Thalès, par exemple, avait une réputation d'excellent homme d'affaires [...]
Les penseurs ioniens avaient des conceptions matérialistes de la nature qui apportèrent des nouveautés intéressantes pour la compréhension scientifique du monde. [...]
[...] D'un autre côté, le fait qu'Anaximène, Héraclite et les autres philosophes ioniens aient été des penseurs plutôt que des artisans limitata leur capacité à contribuer aux sciences. Car bien qu'ils se soient appuyés sur des travaux d'artisans pour former leurs idées sur le fonctionnement de la nature, la connaissance qu'ils en avaient n'était pas de première main. Il ne se trouvèrent pas en situation d'avoir à y apporter des améliorations, et par conséquent ne connurent pas cette profusion de problèmes et de suggestions qui allait engendrer les sciences modernes de la Renaissance. [...]
Platon
[...] Plus tard, Europe, un mathématicien ayant rejoint l'école de Platon, élabora une géométrie «dans laquelle les relations spatiales peuvent être symbolisées assez indépendamment de tout chiffre et étudiées sans référence à des mesures». C'est cette géométrie qui inspira à Platon l'idée d'un «monde séparé constitué de pure intélligibilité». Ainsi culminait la contre-révolution qui renversa la tradition scientifique ionienne qui, elle, cherchait la connaissance de la nature au moyen des sens, par l'observation et l'expérience. Comme Farrington l'expliquait, Platon «représente une réaction politique contre les Lumières ioniennes, servant les intérêts d'une cité-État chauvine, esclavagiste, divisée en classe, et faisant déjà figure d'anachronisme à son époque. [...]
[...] Un autre élément fondamental de l'élitisme platonicien est l'affirmation dans la République que ce n'est pas l'homme qui fabrique une chose, mais l'homme qui l'utilise, qui en possède une véritable connaissance scientifique». La signification et le rôle politique de cette doctrine ne sont pas difficiles à cerner : «On ne peut admettre qu'un esclave qui produit des choses soit possesseur d'une science supérieure à celle de son maître qui les utilise.» Platon mit l'histoire des sciences sur une voie élitiste en donnant le jour à «une opinion antihistorique et grotesque, qui fut ensuite populaire dans l'Antiquité, et selon laquelle ce furent les philosophes qui inventèrent les techniques et qui les transmirent aux esclaves. » [...]
[...] Le noble mensonge de Platon était la justification ultime de l'élitisme, stipulant que les hiérarchies sociales sont immuables puisque créées par Dieu, et que les classes dirigeantes méritent de gouverner car ces membres sont constitués d'une matière supérieure (les aristocrates étant fait d'or, les paysans et artisans de cuivre et de fer). Selon ce programme idéologique, Platon préconisait deux religions séparées : l'une, abstraite et sophistiquée, pour l'intelligentsia, et l'autre, plus vulgaire, avec ses traditionnels dieux et déesses anthropomorphique pour les masses. Pour s'assurer du respect continuel de cette dernière, Platon proposait de condamner les incroyants à cinq années de prison à la première offense et à la mort dès la seconde. Farrington commentait : «C'est ainsi que la persécution pour opinion fut pour la première fois préconisée sur la scène européenne». Le successeur de Platon, Aristote, comprenait lui aussi l'utilité politique de la tradition religieuse : il la qualifiait de «mythe» propagé «en vue de persuader la multitude et pour servir les lois et les intérêts communs» [...]
[...] Mathématiques mises à part, certains historiens ont décrit l'influence générale de Platon comme profondément destructrice pour les sciences. Selon Farrington, son «mépris pour le monde physique», qu'il partageait avec Socrate, « fut l'une des principales raisons de la mort des sciences» dans le monde grec. Il s'agissait d'«un rejet total de l'investigation physique» à la fois «inique» et réactionnaire, aux conséquences «funestes» Après lui, les mathématiques, l'éthique et la théologie se trouvèrent inextricablement entremêlées, en une science à priori détachée de toute expérience».
Comme indiqué précédemment, l'idéalisme platonicien représentait une réaction aristocratique contre le matérialisme des Ioniens, qui cherchaient à acquérir le savoir par l'observation directe de la nature et tiraient leurs conclusions de ce que percevaient leur sens. Platon allait dans une direction totalement opposée en fondant la recherche du savoir exclusivement sur les vérités à priori, une méthode propre à paralyser toute étude scientifique de la nature. [...]
La parenthèse Albert Camus
Monde musulman
Sciences et travail manuel pendant l'«âge d'or» islamique
[...] La transmission des sciences arabes en occident est généralement présenté comme l'œuvre paisible de traducteurs érudits, mais ce fut aussi pour une part une expropriation violente, dans le sillage des guerres qui aboutirent à la destruction des royaumes musulmans d'Espagne. « Si l'attrait pour la philosophie ancienne ne fut pas le motif principal de la croisade des Occidentaux contre Al-Andalus – le fanatismes guerrier et la soif de pillage étaient des motivations bien plus fortes – la prise de possession des enseignements arabes fut l'une des conséquences les plus importantes de la Reconquista.[...].
[...] L'alchimie – encore un mot d'origine arabe, ancêtre du mot «chimie» – était surtout une science d'artisans anonyme. Chez les grecs elle avait « vécu d'une existence obscure parce que les praticiens – les goulots, les teinturiers, les verriers, les potiers, les fabricants de drogues – étaient tenus à l'écart de la société ». Dans le monde musulman, par contre, une bonne partie de ces savoirs furent transcrits. Les plus anciens écrits, qui datent du VIIIe siècle, sont attribués à un alchimiste du nom de Jâbir ibn Hayyân.[...]
[...] C'est en chimie, concluait J.D. Bernal, que les médecins, parfumeurs et métallurgistes du monde musulman contribuèrent le plus à l'avancée générale des sciences. Une bonne part de leur réussite dans ce domaine est due au fait d:avoir en grande part échappé aux préjugé qui avaient tenu les grecs à l'écart des activités manuelles.[...]
Quelques personnalités
Thalès de Milet (625-547 av. notre ère)
Commerçant, ingénieur, scientifique, mathématicien, philosophe et homme politique grec ; Thalès de Milet est considéré comme le premier philosophe de la nature, il a su s'écarter des discours explicatifs délivrés par la mythologie pour privilégier une approche naturaliste caractérisée par l'observation et la démonstration.
Galilée (1564-1642), mathématicien, géomètre, physicien et astronome italien
Al-Razi (865-925)
Abu Bakr Mohammad in Zakariya al-Razi
Médecin, alchimiste, et philosophe iranien
Michel-Ange (1475-1564), sculpteur, peintre, architecte, poète, urbaniste florentin ; par Daniele da Volterra
Francis Bacon (1561-1626), scientifique et philosophe anglais
Antonio Giacomo Stradivari, dit Stradivarius (1644-1737), artisan luthier italien
Thierry Hermès, artisan arnacheur sellier, fondateur de la marque Hermès
Roman de Jean Diwo, éd. Flammarion
La saga de la famille Hermès
Arts, artisans et artistes...
Artisanat
Tailleur de pierre
Sculpteur de pierre
Moïse, une sculpture de Michel Ange
Europe
Moyen Âge
Chantier
Architectes médiévaux
Mâçon
Plan
Extrait d'un règlement de corporation
Les (sceaux) bannières des corporations
La cathédrale Notre-Dame de Strasbourg, au Moyen Âge
Construction : (1015) 1176-1439
Hauteur : 142 m
Instrument et immobilier
La musique et la pierre
Violon
Stradivarius “Lady Blunt”, 1721
Artisan : Antonio Giacomo Stradivari (1644-1737), luthier italien ; élève de Niccolò Amati
La cathédrale Notre-Dame de Strasbourg (Alsace), Grand Est, France
Libéralisme (économique), industrialisation et conditions du travail
XIXe siècle
Restif de la Bretonne, écrivain
Nicolas Edme Restif, dit Restif de la Bretonne (1734-1806), écrivain
“ Le premier paysan écrivain ” :
Berger, typographe, écrivain, réformateur, philosophe, libertin, visionnaire, il fut tout cela à la fois.
Fils de riches paysans de l'Yonne, il emmenage avec sa famille lorsqu'il a huit ans dans la ferme de La Bretonne, située dans le village de Sacy. Devenu ouvrier typographe à Auxerre et Dijon, Nicolas Restif de la Bretonne s'installe à Paris en 1761 : c'est alors qu'il commence à écrire... Il connaît le succès et la gloire des 1775 avec Le paysan perverti.
Restif de la Bretonne
Première illustration des Nuits de Paris (1788), dessinée et gravée par Moreau le Jeune.
L'art du vitrail
Emmanuelle Andrieux-Lefèvre, artisan
Vidéos
Europe
Les corporations au Moyen Âge
Les métiers au Moyen Âge
Le commerce au Moyen Âge
Camille Berthollet : “Danse macabre” de Camille Saint-Saëns
"La Liste de Schindler'” de John Williams
Schindler's Liste”, extrait du film
Couverture, photo : Construction du Rockefeller Center, documentaire de Seán Ó Cualáin –Men at lunch (First l'un Features), 1932, photographe inconnu ; Histoire populaire des sciences, Clifford D. Conner, Éd. de L'Échappée ; Une autre histoire du monde, Dorling Kindersley Limited ; Colette et les peintres en bâtiment, photo : Passerelles BNF ; “Ni Savoir-faire ni Maitre” , texte : Vlasios Maximum, photo (2) : représentation de Briget O'Donnel avec ses deux enfants, Grande Famine en Irlande (1845-1852, image publiée le 22 décembre 1849 ; Monde, La naissance de la créativité / photo : Marc Riboud ; Galerie, Immeubles anciens : du XVIe au XVIIIe siècle / couverture : Musée des Arts Décoratifs et Appartements du Palais Rohan de Strasbourg / photo : Avant Garde Photo ; Gifs : Charlie Chaplin, “Les Temps Modernes” ; Cathédrale Notre-Dame de Strasbourg [crédits] / photo 1 : Elham Hoxhalli / photo 2 : Cathédrale Notre-Dame de Strasbourg
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